Fatale rivalité

 

 

Mars 1899
Lu Ma  Me  Je Ve Sa Di

 

 

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Parti de Southampton à destination de Guernesey puis Jersey, le Stella de la London & South Western Railway, Capitaine William Reeks, avait à son bord 174 passagers et 43 membres d'équipage pour cette première traversée de la saison d'été qui s'ouvrait avec le grand week-end pascal. Il devait arriver à St Pierre Port à 17 heures 30, tout comme l'Ibex de la Great Western, son grand concurrent.

En milieu d'après-midi, le brouillard faisait son apparition, ce qui aurait du inciter le Capitaine à ralentir mais celui-ci, confiant dans son estime, voulant atteindre Guernesey avant la nuit et surtout avant l'Ibex, poursuivait sa route à toute vapeur avec une vitesse estimée à 18 noeuds.

Vers 16 heures, on entendait soudain la corne de brume des Casquets très proche tandis qu'au même instant un veilleur signalait des récifs droit devant. Reeks faisait alors mettre la barre à gauche toute pour parer ce danger, mais ce nouveau cap le menait droit sur un récif connu sous le nom de Roche Noire qu'il heurta avec une force considérable avant de finir contre un autre récif, la coque éventrée. En moins de dix minutes, le Stella sombrait par l'arrière. Malgré une excellente discipline, il n'y avait pas beaucoup de temps pour sauver les occupants du navire. Sur les 7 canots que possédait le paquebot, l'un d'eux surchargé se retourna en atteignant la mer, noyant beaucoup de ses occupants. Les autres furent mis à l'eau sans accident. Deux d'entre eux furent retrouvés dérivant le lendemain matin par le Vera de la même compagnie, tandis que deux autres étaient recueillis par le Lynx de la Great Western qui s'était joint aux recherches. Le canot qui avait chaviré fut retrouvé par le remorqueur français Marsouin de Cherbourg.

L'alerte fut donnée très tard car le naufrage ne fut ni vu ni entendu par les gardiens du feu des Casquets, pas plus que dans l'Ile d'Aurigny. Il semble par contre que l'explosion des chaudières ait été entendue par quelques personnes sur l'île de Sark, à 17 milles de là. Le nombre total des victimes ne fut pas déterminé précisément car il n'existait pas de liste d'embarquement (ce qui ne sera pas le cas pour le Hilda six ans plus tard). Il est estimé compris entre 105 et 112 dont le Capitaine Reeks. Même s'il ne fut pas fait état d'une course entre le Stella et l'Ibex, la commission d'enquête releva néanmoins le fait que la publication de deux horaires identiques par deux compagnies concurrentes ne pouvait qu'entraîner une tentation dans ce sens chez les Capitaines. Plus prudent ou peut-être plus chanceux, le Capitaine de l'Ibex atteignait St Pierre Port avec un retard d'une heure 30 sur l'horaire. En disparaissant avec son navire, le Capitaine Reeks sauvait son honneur mais l'histoire retiendra surtout le nom de Mary Ann Rogers, une femme de chambre de l'équipage qui donna sa ceinture de sauvetage à une passagère qui en était démunie. La courageuse femme coula avec le navire mais son nom reste honoré en divers lieux de Grande Bretagne, notamment à Guernesey et Southampton.

William Reeks

Sauvetage d'un canot par le Vera

 

 
 

 
 

 

L'épave se trouve par 50 mètres de profondeur vers le point 49.43N 02.23W.

 

 
 

►   Retrouvez le récit complet de ce naufrage, extrait de "1850-1950, Cent ans d'histoires de mer dans la Manche", © Yves DUFEIL, 1975.

 

►  Egalement à consulter, cette intéressante plaquette en anglais éditée par le Guernsey Museum, un document pdf à

 

 
 

et aussi...

   ►  Un ouvrage remarquablement documenté à ne pas manquer pour la qualité et la diversité de ses photos, notamment de l'épave :

STELLA, Titanic of the Channel Islands

John Ovenden & David Shayer

Guernsey Museum Galleries, 1999

ISBN 1.871560