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Parti de
Southampton à destination de Guernesey puis Jersey, le Stella de la
London & South Western Railway, Capitaine William Reeks, avait à son bord 174 passagers et 43
membres
d'équipage pour cette première traversée de la saison d'été qui s'ouvrait
avec le grand week-end pascal. Il devait arriver à St Pierre Port à 17
heures 30, tout comme l'Ibex de la Great Western, son grand
concurrent.
En milieu d'après-midi, le brouillard
faisait son apparition, ce qui aurait du inciter le Capitaine à ralentir
mais celui-ci, confiant dans son estime, voulant atteindre Guernesey avant
la nuit et surtout avant l'Ibex, poursuivait sa route à toute vapeur
avec une vitesse estimée à 18 noeuds.
Vers 16 heures, on entendait soudain la
corne de brume des Casquets très proche tandis qu'au même instant un
veilleur signalait des récifs droit devant. Reeks faisait alors mettre la
barre à gauche toute pour parer ce danger, mais ce nouveau cap le menait
droit sur un récif connu sous le nom de Roche Noire qu'il heurta avec une
force considérable avant de finir contre un autre récif, la coque éventrée.
En moins de dix minutes, le Stella sombrait par l'arrière. Malgré une
excellente discipline, il n'y avait pas beaucoup de temps pour sauver les
occupants du navire. Sur les 7 canots que possédait le paquebot, l'un d'eux
surchargé se retourna en atteignant la mer, noyant beaucoup de ses
occupants. Les autres furent mis à l'eau sans accident. Deux d'entre eux
furent retrouvés dérivant le lendemain matin par le Vera de la même
compagnie, tandis que deux autres étaient recueillis par le Lynx de
la Great Western qui s'était joint aux recherches. Le canot qui avait
chaviré fut retrouvé par le remorqueur français Marsouin de
Cherbourg.
L'alerte fut donnée très tard car le
naufrage ne fut ni vu ni entendu par les gardiens du feu des Casquets, pas
plus que dans l'Ile d'Aurigny. Il semble par contre que l'explosion des
chaudières ait été entendue par quelques personnes sur l'île de Sark, à 17
milles de là. Le nombre total des victimes ne fut pas déterminé précisément
car il n'existait pas de liste d'embarquement (ce qui ne sera pas le cas
pour le Hilda six ans plus tard). Il est estimé compris entre 105 et 112 dont le Capitaine
Reeks. Même s'il ne fut pas fait état d'une course entre le Stella et
l'Ibex, la commission d'enquête releva néanmoins le fait que la
publication de deux horaires identiques par deux compagnies concurrentes ne
pouvait qu'entraîner une tentation dans ce sens chez les Capitaines. Plus
prudent ou peut-être plus chanceux, le Capitaine de l'Ibex atteignait
St Pierre Port avec un retard d'une heure 30 sur l'horaire. En disparaissant
avec son navire, le Capitaine Reeks sauvait son honneur mais l'histoire
retiendra surtout le nom de Mary Ann Rogers, une femme de chambre de
l'équipage qui donna sa ceinture de sauvetage à une passagère qui en était
démunie. La courageuse femme coula avec le navire mais son nom reste honoré
en divers lieux de Grande Bretagne, notamment à Guernesey et Southampton.
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William
Reeks
Sauvetage
d'un canot
par le Vera
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Retrouvez le
récit complet de ce naufrage,
extrait de "1850-1950, Cent ans d'histoires de mer dans la Manche", ©
Yves DUFEIL, 1975.
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Egalement à consulter,
cette intéressante plaquette en anglais éditée par le Guernsey Museum, un document pdf
à
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et aussi...
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Un
ouvrage remarquablement documenté à ne pas manquer pour la qualité et la diversité de ses
photos, notamment de l'épave :
STELLA,
Titanic of the Channel Islands
John Ovenden & David Shayer
Guernsey Museum Galleries, 1999
ISBN 1.871560
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