VULCANUS
Cargo à
vapeur construit aux Chantiers Palmers & Co de Newcastle
sous le n° 512
Entré en
service en Août 1883 sous le nom de MOLIERE pour l'armement Hill &
Co de Cardiff
Longueur
76 m., largeur 10m65, tirant d'eau 5m40. Tonnage brut 1459
tonnes.
Machine à
vapeur compound d'une puissance nominale de 173 CV
Renommé
Vulcanus en 1907 puis
racheté par la Cie Charles Schiaffino et A.Jouvet en 1912. Port
d'attache Alger.
Bizerte, 31 Mai 1917, 17 heures
Un convoi de 4 vapeurs au nombre
desquels se trouve le Vulcanus de la compagnie Schiaffino
d'Alger, appareille à destination de Messine,
escorté par deux canonnières. Le temps est beau, la mer est belle. Si ce
n'était le péril sous-marin qui menace en permanence, la traversée
serait une partie de plaisir. A son bord, un équipage de 23 hommes sous
le commandement du Capitaine Antoine Navarolli et dans les soutes
plusieurs centaines de tonnes de charbon et de frets divers.
Le Vulcanus
pouvait ressembler à ce vapeur |
Marque de cheminée Cie Schiaffino
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Sous-marin U-47, 31
mai, 18 heures
La dernière droite de
hauteur de la journée a permis de fixer la position du sous-marin. Il
est à une centaine de milles dans l'ouest de l'île de la Galite, un
petit archipel au large des côtes tunisiennes, en route cap à l'est.
Cela fait plus d'un mois que l'U-47 et son équipage de 34 hommes
commandés par le Kapitänleutnant Heinrich Metzger
ont quitté leur
base de Cattaro et la perspective d'un retour désormais proche donne à
tous un nouvel entrain. Cette patrouille qui
s'achève a conduit l'U-47 au-delà de Gibraltar jusque dans l'Atlantique
où il a fait assez bonne chasse ayant coulé 7 navires représentant
environ 12000 tonnes. Seule ombre au tableau, il y a un homme de moins à
bord que lors du départ. En effet, le matelot Erich a été tué par l'explosion
prématurée d'une charge de sabordage qu'il venait de placer à bord d'un
voilier arraisoné.
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KL Heinrich Metzger
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Joseph Sanguinetti
Tous les deux ont
le même age ! |
Mais pour l'instant,
l'horizon est désert et on se prépare à une nuit de plus en mer dans le
confort pour le moins spartiate du sous-marin.
Samedi 2 juin
Après quelques heures
d'escale à Messine où l'on a chargé encore du fret pour Argostoli, le
Vulcanus reprend seul la mer vers 23 heures, escorté cette fois du
Vulcain, un chalutier armé. Vulcanus et Vulcain...
on dirait deux membres d'une même famille de divinités. A 1 heure du
matin le 3, on passe Spartivento et on met cap à l'est en direction de
l'île grecque de Céphalonie. Tout est calme à bord, Joseph Sanguinetti à
la barre gouverne sur la faible lueur du feu de poupe de l'escorteur.
A la même heure,
l'U-47 en route au nord-est a mis le cap sur le canal d'Otrante.
Navigation paisible en surface, un diesel pour la propulsion, le
deuxième pour la charge des batteries...
Le destin est en marche, deux sillages
vont se croiser...
10h30
A bord de l'U-47 on a repéré
des fumées
derrière l'horizon. Cap sur ces bateaux et après quelques milles en rapprochement, deux navires
sont identifiés : un vapeur précédé d'un chalutier escorteur. La route moyenne est
déterminée, il ne reste plus à Metzger qu'à se placer à bonne distance
de tir sans se faire repérer. Les batteries sont à pleine charge, la
route du but est désormais certaine, tout est paré. Plongée !
11h20
Sur la passerelle du
Vulcanus on veille et on veille bien ! Avec une mer aussi belle, on
doit pouvoir repérer le moindre périscope. Raison de plus pour être
encore plus attentif. Joseph Sanguinetti qui se détendait sur le pont se
dirige vers le poste d'équipage pour déjeuner ; il prend le quart à
midi. Au carré aussi on déjeune et on discute de choses et d'autres.
Tout à coup, dans un fracas de fin du
monde, une formidable explosion ébranle le navire. Torpille ! La vieille
coque du Vulcanus ne résiste pas à l'ébranlement, elle se
déchire, s'ouvre et boit la mer.
Il s'en faudra de
bien peu de minutes avant
que le vapeur ne disparaisse dans la mer indifférente qui continue à
scintiller sous les rayons du soleil. Pour certains dans la machine, il
est trop tard. Pour d'autres qui étaient au bon endroit au bon moment,
il y a encore une chance... C'est le cas de Sanguinetti, il a juste le
temps de se précipiter sur le pont, d'entendre le Capitaine crier
d'évacuer et de se précipiter vers la baleinière bâbord, la seule qui
ait survécu à l'explosion. Mais ses garants sont bloqués ! Chance encore
pour Joseph, ce couteau de matelot qui ne le quitte jamais, il est
toujours dans sa poche. Alors, avec l'énergie du désespoir, il tranche,
il tranche encore, il ne cesse pas de trancher jusqu'à ce qu'enfin
l'embarcation file librement. Tellement librement, qu'elle file
directement à la mer ! Sanguinetti et plusieurs autres se jettent à
l'eau alors que déjà le pont du Vulcanus est presque submergé. Ils nagent
quelques mètres et se hissent à bord du canot. Sauvés !
Antoine Navarolli constatant l'absence
du personnel de quart à la machine s'est précipité à la chaufferie alors
que son bateau coule. Pour le Capitaine comme pour les mécaniciens et
chauffeurs, il est trop tard. Les cloisons cèdent, le navire s'enfonce
par l'avant et en moins de cinq minutes, il disparaît sous les flots qui
instantanément se referment sur lui.
Midi.
Le Vulcain a tenté
sans grande conviction une passe de
grenadage sur le point supposé où devait se trouver le sous-marin puis
il est vite revenu sur le lieu du naufrage et repêche les survivants. Ils
ne sont plus que 17, sept hommes ont disparu avec le vapeur.
L'U-47 a facilement échappé au
Vulcain. Il était déjà loin quand l'escorteur a grenadé et lorsqu'il
fait surface une demi heure plus tard, la mer est à nouveau déserte.
Comme si rien n'était arrivé. Il entre à Cattaro le lendemain soir non
sans avoir échappé de peu à deux torpilles lancées par le submersible
italien W-4 en embuscade dans le Canal d'Otrante.
Cette patrouille qui
se termine sera la dernière de l'U-47. Ses moteurs sont bons à changer
et de Cattaro il rejoint Pola au fond de l'Adriatique où l'on espère
malgré tout le remettre en état. Peine perdue, il finira là, sabordé sur place
à la fin d'octobre 1918. Heinrich Metzger lui, prendra le commandement de
l'U-63, échappera une fois encore de justesse à la mort avec l'U-39 et devra se
résoudre à laisser interner son bateau gravement endommagé dans le port
espagnol de Valence. Il survivra à la guerre.
Joseph
Sanguinetti reprendra du service dans la Marine Marchande jusqu'à son
décès à l'été 1930 en cette terre algéroise qui l'a vu naître et où il
sera inhumé, sans rien connaître des drames qui
accompagneront la fin de l'Algérie française.
Patrouilleur
auxiliaire Vulcain-II commandé
par le premier maître de manœuvre RICHAUD
–, Journal de navigation n° - / 1916 – 15 avr. ~ 9 juin
1917 –
Service historique de la
Défense, S.G.A. « Mémoire des hommes », Cote SS Y
642, p. num. 308 à 310. |
2 juin 1917
17 h. 00 – Appareillé de Messine avec ordre d’escorter
Vulcanus à Argostoli.
19 h. 10 – Vulcanus en ligne de file
derrière.
23 h. 40 – 6,5 milles Spartivento.
3 juin 1917
0 h. 00 – Vulcanus à 800 m en arrière.
10 h. 25 – Une explosion se produit à bord du
Vulcanus, le navire venant d’être torpillé. Venu
aussitôt à gauche toute ; rappelé au poste de combat, canon
chargé, grenades prêtes à jeter. Lancé aussi le Allo 37° 57’ N.
~ 17° 50’ E. ; aucun navire ne répond à l’appel. Le
Vulcanus coule en moins de 2 minutes. Évolué autour de
l’épave sans apercevoir trace de remous ni de sillage.
10 h. 30 – Amené le canot et le berthon pour aller recueillir
les survivants. Continué à patrouiller dans toutes les
directions à proximité de l’épave.
11 h. 00 – Embarqué à bord 17 survivants ; les canots
continuent leur recherche. Exploré les lieux du torpillage à une
distance maximum de un mille de l’épave.
12 h. 00 – Hissé les deux embarcations et patrouillé jusqu’à
15 h.00. T.S.F. envoie Allo tous les ¼ d’heure.
15 h. 00 – Fait route sur Argostoli.
4 juin 1917
8 h. 10 – Origine chenal de sécurité.
8 h. 55 – Franchi barrage.
9 h. 20 – Accosté Shamrock et débarqué les
17 survivants du Vulcanus. Rendu compte de la
traversée au chef d’état-major [à bord du]
Michelet. »
Marins disparus le 3 juin 1917 avec le cargo
Vulcanus
(Décision du Commissaire des Transports maritimes et de
la Marine en date du 23 février 1918 requérant le Procureur
général près la Cour d’appel d’Alger de poursuivre d’office la
constatation judiciaire des marins disparus avec le cargo
Vulcanus : J.O. 24 févr. 1918, p. 1.864).
— NAVAROLI Antoine Marie. Capitaine
au long-cours, inscrit à Bastia, n° 220 ; capitaine.
— BOYER Paul Julien Urbain.
Chef mécanicien, inscrit au quartier de Marseille, n°
1.870.
— VIRCONDELET Joseph Albert.
Second mécanicien, inscrit à Alger, n° 2.042.
— ROCHE Antonin. Premier
chauffeur, inscrit à Sète, n° 1.185.
— NICOLAÏ Pierre Antoine.
Maître d’équipage, inscrit à Bastia, n° 4.615.
— DUMONT Marcelin Antoine.
Matelot, inscrit à Alger, n° 2.579.
— APPRIOU François Marie.
Matelot, inscrit au Conquet, n° 43.431.
— REINE Alfred Louis, né le 31 août
1891 à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) et y domicilié,
Matelot de 2e classe mécanicien [Opérateur
T.S.F.], Direction du port de Sidi-Abdallah,
Matricule n° 52.616 – 5 (Jug. Trib. civ. Alger, 5 avr. 1818,
transcrit à Clermont-Ferrand, le 30 avr. 1918).
Par arrêté du Ministre de la Marine en date du 4 janvier 1922
(art. 2 ; J.O. 12 janv. 1922, p. 602), inscrit à titre
posthume au tableau spécial de la Médaille militaire
|
A ceux que cette histoire aura intéressé, je propose
de télécharger ci-dessous le récit que j'ai pu faire à partir des pièces
d'archives consultées. C'est celui que j'ai remis à la famille de Joseph
Sanguinetti, modeste témoignage d'un épisode de cette guerre
sans merci.
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Vulcanus
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Un videorama d'une durée
de 7 minutes relatant cet épisode est également visible sur le site
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